Le développement durable crée-t-il du lien social ? Un cas d’application depuis l’Algérie

BENBEKHTI Omar
Sociologue, Faculté des sciences sociales, Université d’Oran 2, Algérie


ARDD-1-2021 – Développement durable : recherches en actes

Analyses : politiques, pratiques, mobilisations


Pour citer cet article

BENBEKHTI Omar : « Le développement durable crée-t-il du lien social ? Un cas d’application depuis l’Algérie », Actes de la recherche sur le développement durable, n°1, 2021.
ISSN : 2790-0355 (version en ligne) — ISSN : 2790-0347 (version imprimée)
URL : https://publications-univ-sud.org/ardd/2021/12/545/
DOI : (à compléter)


Texte intégral

Le développement durable crée-t-il du lien social ? Un cas d’application depuis l’Algérie

par Omar BENBEKHTI

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Nous essaierons de répondre à cette question à partir d’une expérience réalisée en 2019 en Algérie à travers la mise en œuvre d’un projet de la Direction Générale des Forêts (DGF), soutenu par la FAO[1], dénommé « Projet de développement durable d’une filière de Produits Forestiers Non Ligneux » (PFNL). Ce projet est censé inscrire une action de développement durable dans le cadre du développement rural. Nous tâcherons de comprendre ce que peut signifier « développement rural » dans un ensemble plus global appelé « développement durable » (Benbekhti, 2004).

Ce projet, auquel l’auteur a participé pour le compte de la FAO en tant que consultant socio-économiste, pose la problématique de l’engagement des populations à ce que l’on appelle le développement durable[2]. Autrement dit, l’espace démocratique d’intervention, la capacité de créer du lien social et d’assurer la pérennité des actions menées. D’un point de vue académique, celui-ci exige une approche multidisciplinaire enveloppant tous les secteurs d’activité. Mais sa planification est basée sur une vision stratégique politique, élaborée consensuellement, bâtie sur la complémentarité, la convergence, la solidarité, et le partenariat. Ce mode opératoire est indispensable pour une politique d’aménagement du développement durable ajustée à une économie de territoire.

Ceci nous interroge sur l’action politique à mener quant aux choix à opérer, et partant, de la démocratie. Au-delà d’une problématique qui touche à la décentralisation, voire la régionalisation du pouvoir, cela reste un leurre, probablement lié au libéralisme capitaliste pour détourner l’attention de l’enjeu politique. En effet, le développement durable pose la question de ce qui justifie la concentration des pouvoirs et leur centralisation. Des plans sont conçus par des bureaucrates, coupés des besoins des régions et sans cohérence. Les exemples foisonnent parmi les plans de développement rural, l’intérêt général s’exprimant comme une vague promesse, un mot de fortune.

Les enjeux du développement durable

L’expression « développement durable » s’est généralisée depuis le Sommet de la Terre tenu à Rio 1992 après la publication en 1987 du rapport Notre avenir à tous. Sa définition apparaît dans le rapport Brundtland. Elle peut paraître tautologique, car le développement est, de par sa propre dynamique, durable. Pourtant, elle est utilisée depuis par les experts-bureaucrates des institutions internationales, et s’est généralisée à tous les domaines de l’activité humaine sans que des résultats probants conséquents ne soient reconnus à travers le monde. Au-delà des actions menées ici et là, dans des pays pauvres et sous-développés, le concept est demeuré vague, diffus et son emprise sur le terrain incertaine. Aujourd’hui on y adjoint le vocable d’environnement, sans prendre en considération la dynamique d’une nature qui impose ses lois à ce couple « environnement et développement durable ». Dès lors, il est légitime de se demander de quels actes de gestion on peut se prévaloir lorsqu’on avance une telle expression.

Pour de nombreux pays en quête de développement durable, ce qui semble être recherché c’est le passage d’une économie administrée à une économie en transition vers le marché. En somme un pas vers le libéralisme ; car il s’agit de s’adapter au marché. À travers le développement durable, ce serait donc un nouvel ordre, une nouvelle dimension dans le temps économique par la réalisation d’activités préalablement identifiées. Le concept de développement local, adossé à la décentralisation, se concrétise par la gestion participative.

Est-ce pour autant la bonne méthode pour réduire les inégalités, la pauvreté et le désordre ? Sous prétexte de mise à niveau, on est tenté de suivre les modèles importés qui risquent en réalité de creuser davantage le fossé des inégalités, et privilégier les relations marchandes. La pandémie déclarée du Covid-19 a généré un sentiment d’insécurité alimentaire et des mutations drastiques dans les économies riches et pauvres. Les gouvernants ont été contraints de redimensionner leurs rapports avec les citoyens. Il s’agit dès lors d’évoquer le développement durable sans se perdre dans les méandres conceptuels surgis depuis la mise en vogue de cette expression. Lorsqu’on évoque la durabilité, ce qui est en cause c’est le temps qui est un facteur de peur. Hier est passé, c’est une mémoire. Demain est incertain, même si ce peut être un investissement. Mais le temps peut devenir un ennemi. Le processus qu’aborde le développement durable s’inscrit dans le temps. Cela exige donc qu’il prenne en compte le « maintenant », autrement dit ce qui est. On ne peut faire l’impasse sur la situation telle qu’elle est, et non telle qu’elle devrait être. Dans son acception actuelle c’est cette vision qui s’est imposée : ce qui devrait être. On va souvent vers les descriptions et explications, mais rarement vers les racines de l’existant. Et l’on met en œuvre des « stratégies », des « politiques », des méthodologies pour atteindre le développement durable. Les termes développement et durable sont tous deux liés au temps. Ils sont de ce fait identiques. Alors pourquoi cette expression ?

Ce qui est probablement utile dans le développement durable c’est sa capacité à créer du lien social. Il paraît être en mesure de recréer ce lien social tellement malmené par la centralisation excessive de l’État jacobin. N’est-il donc pas nécessaire de tout remettre à plat ?

« Les notions de décentralisation ou de développement par le “bas” sont […] largement médiatisées, mais faiblement mis en œuvre » (Sahli, 2021)[3]. Ce qui demeure une problématique floue à ce jour, c’est le mode opératoire du développement durable. Pour mettre en place une décentralisation de la gestion et une mobilisation des acteurs locaux, il faut enclencher des initiatives qui ont du mal à se construire dans la durée. Il s’agit donc de revoir les fondements du développement local et durable. Ce mode opératoire a mis l’accent sur le « localisme », à savoir que les actions de développement devaient associer les acteurs locaux dans les démarches de conception et de mise en œuvre des processus et des objectifs à fixer. Cette démarche s’est cantonnée en général, et quel que soit le lieu, à « l’approche participative » que l’on a tenté de codifier comme une « Bible » du développement durable.

Les contenus du développement durable

Le développement local durable est pensé comme processus de croissance des ressources et de génération de revenus basé sur les conditions du milieu et de l’espace. Diverses actions seront donc mises en œuvre. Elles sont censées être portées par les acteurs locaux sur la base d’initiatives économiquement viables, c’est-à-dire génératrices de revenus, avec maîtrise locale des activités de croissance. L’espace socioéconomique local devient ainsi l’outil pour mobiliser les ressources et les acteurs locaux. On dira qu’aménager le territoire local, c’est prendre en compte la « territorialité » des habitants en tant que communauté. Cette formulation est accolée à de nombreux intitulés, dans divers champs d’activité, sans que l’on décèle les liens entre la durabilité et le champ d’activité. Car rien n’est précisé concernant l’apport d’un marché porteur de ces activités, ni qui sera en mesure de le réguler : sera-ce la loi de l’offre et de la demande, ou une « main invisible » que personne ne connait ? Quels contenus dès lors accorder aux pratiques liées à cette expression ?

Apprendre à développer durablement ne signifie pas appliquer des connaissances universelles, ni obéir à un modèle de gouvernance. Apprendre est un processus interminable, il ne s’inscrit pas dans une durée. Tout ce qui vit est appelé à se développer, à évoluer, à se transformer et à disparaître. Tout ce qui vit est limité par le temps et a une fin. C’est un cycle qui se renouvelle indéfiniment.

L’objectif de ce développement serait de repenser les rapports entre les êtres humains, autrement dit de créer du lien social ; et entre eux et la nature. Ce mode de développement est appréhendé comme facteur de croissance harmonieuse de l’économie, de la création d’emplois, de la richesse équitablement partagée. Cela peut aller de l’économie sociale et solidaire, l’économie circulaire (réemploi, réparation, recyclage), le commerce équitable, la relocalisation d’activités industrielles, les énergies renouvelables, l’écoconception, l’agriculture « bio », etc. Il existe comme un effet de récupération de la formule « développement durable » pour soutenir parfois les investissements d’un business sans rapport avec une optique de développement. Et cela peut se transformer soit en une remise en cause du capitalisme, et donc d’une croissance qui devrait se poursuivre en permanence ; soit en un recommencement, qui en vérité, n’est pas dans l’ordre de l’économie humaine appelée à s’adapter continuellement.

Construire durable ça se comprend, développer durable semble antinomique avec l’idée même du développement par définition arythmique. Le développement durable n’est pas une affaire de recettes standard à saupoudrer sur n’importe quel territoire. C’est avant tout un engagement politique pour laisser le choix aux habitants d’un espace d’être capables de produire les moyens de leur existence selon l’écosystème local et en harmonie avec leurs besoins. Cette action suppose une implication des acteurs locaux, une connaissance des territoires et de la population, et une décentralisation de la décision. Ceci est censé se produire à travers l’approche participative. C’est quoi au juste l’approche participative, devenue panacée du développement durable ? Le développement durable est-il indissociable d’une approche globale, une approche qui n’appréhende pas la réalité du développement de façon parcellaire, divisée par une vision atomisée des effets des transformations d’une société sur des secteurs éclatés ?

Histoire d’une chaîne de valeur

La FAO définit les produits forestiers non ligneux comme « des biens d’origine biologique autres que le bois, dérivés des forêts, des autres terres boisées, et des arbres hors forêts. » (FAO, 1999). Leur statut sauvage ou semi-domestiqué les distingue de cultures agricoles bien établies. Les PFNL peuvent être distingués selon leur destination : les usages domestiques et/ou la vente. Ils connaissent un regain d’intérêt, dû selon la FAO, à « une prise de conscience accrue de leur contribution à l’économie des ménages et à la sécurité alimentaire, à quelques économies nationales, et à certains objectifs écologiques, tels que la conservation de la diversité biologique » (ibid.). À l’échelon local, les produits forestiers non ligneux fournissent la matière première pour des opérations de transformation industrielle à grande échelle, pour la fabrication de produits commercialisés à l’échelle internationale : aliments et boissons, confiseries, arômes, parfums, médicaments, peintures ou vernis. L’exploitation raisonnée des produits forestiers constituerait donc une manière de protéger la biodiversité, en offrant des possibilités de développement.

Trois espèces particulières de PFNL ont été sélectionnées pour l’étude : le romarin, le pin pignon et surtout le caroubier. Les outils méthodologiques ont été basés sur des entretiens avec les parties gravitant autour de la filière : Conservation des forêts, Direction des services  agricoles, Direction de l’emploi, Comités intersectoriels, Assemblées populaires de wilaya[4], des éleveurs, des chercheurs et enseignants universitaires, des collecteurs, des regroupeurs et des exploitants (distilleurs et transformateurs associations de femmes rurales, riverains des forêts visitées). D’autres entretiens ont eu lieu avec les responsables administratifs des communes (présidents et membres d’Assemblées populaires communales), avec les agents forestiers des districts et avec des groupements de paysans riverains. Enfin, des personnes ressources ont été entendues : des jeunes, des femmes présidentes d’associations rurales et des cultivateurs (DGF/FAO, 2021).

L’approche de la filière se focalise sur trois points : le potentiel physique existant censé constituer le socle d’une amélioration des revenus des populations locales, leur rôle de préservation des ressources de la forêt et leur rôle de gestion d’une filière de PFNL. L’objectif est de promouvoir des petites entreprises afin d’organiser un marché « déjà là » dominé par des pratiques informelles préjudiciables à un épanouissement normalisé de la filière. Cette vision crée des obstacles d’ordre social, institutionnel, commercial et de gestion qui freinent un développement durable de la filière. Pourquoi ?

La pensée a formaté les objets du développement en secteurs différenciés, voire en opposition : l’agriculture, l’industrie et les services, ouvrant la voie à des approches fragmentées. Or ces activités sont liées, intégrées, complémentaires ; elles forment un ensemble qui ne souffre aucune division. D’où la nécessité d’appréhender le développement sous une forme globale. Cela exige évidemment une pensée intégratrice.

Le développement durable est une vision globale de l’humain, non segmenté, non divisé, non fragmenté. Il n’est pas seulement basé sur la connaissance, qui n’est que de la mémoire et des expériences. Il s’agit de créer une coopération entre la production et les services incluant une vision de préservation des terroirs et l’aménagement des écosystèmes. C’est le système coopératif qui est à promouvoir. Les chiffres ci-après donnent la mesure du pouvoir de la coopération : en 2015 en Europe, 180 000 entreprises coopératives avec 140 millions de membres employaient 4,5 millions de salariés et généraient 1 000 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Au Kenya, la part de marché des coopératives est de 70% pour le café, 76% pour les produits laitiers, et 95% pour le coton. En 2005, la Coopérative laitière indienne, qui compte 12,3 millions de membres, représentait 22% de la production laitière de l’Inde. Au Brésil, les coopératives pèsent 40% du PIB agricole.

La liberté d’organisation de la société civile et des coopératives apparaît ainsi incontournable si l’on veut voir s’épanouir un développement local. Mais cela ne va pas de soi. Leur faiblesse organisationnelle est due, en partie, à la fébrilité des pouvoirs publics jaloux de leurs prérogatives.  La société civile est considérée comme mineure et incapable, ce qui renforce la gouvernance jacobine, centralisée, autoritaire et hégémonique. Décentraliser la gouvernance permettra de libérer les initiatives ; une autre organisation de la société se mettra en place. Les programmes gouvernementaux consacrés au développement rural, avec de gros budgets, n’ont jamais été évalués. Réhabiliter les coopératives de production et de services doit ouvrir de nouveaux espaces de proximité comme l’étaient les Coopératives Polyvalentes de Services (CAPCS) des années 1970. Celles-ci, en Algérie, avaient été dissoutes sous la pression du FMI et de la Banque mondiale lors du plan d’ajustement structurel des années 1990.

Laisser l’initiative aux acteurs locaux, c’est leur permettre de se prendre en charge pour peu que les richesses soient équitablement réparties au profit des territoires. En vérité, c’est cela l’approche participative ; et c’est de cette façon que se développe le lien social. Durant l’épidémie de Covid-19, les agriculteurs et autres travailleurs du monde rural, en approvisionnant les marchés sans discontinuer, ont donné une leçon de responsabilité, de conscience et de courage aux habitants, gouvernants, citadins et hommes politiques. Pourtant, les coopératives de distribution restent soumises à une réglementation qui limite leurs activités et celles des agriculteurs. Il devient donc  nécessaire de mettre à jour le rôle et les activités du secteur coopératif avec les besoins des agriculteurs et les exigences du marché.

Dans le cadre du projet à mettre en œuvre pour la FAO et la Direction générale des forêts, il s’agissait de répondre concrètement aux questions suivantes :

– Quelles sont les actions pour valoriser les PFNL, au niveau des politiques publiques ainsi qu’au niveau des acteurs, afin de promouvoir des petites entreprises ?

– Quelle stratégie adopter, quel plan d’action pour une filière professionnelle ?

Gestion des forêts et exploitation de PFNL sont deux choses différentes. Ceci ramène à la problématique centrale : l’exploitation à grande échelle de certains PFNL est un facteur pour la diversification de l’économie mais peut présenter un risque pour la préservation des ressources dans la mesure où les acteurs qui les exploitent dans l’illégalité ne prennent pas en considération les dégradations causées aux espèces et aux espaces forestiers par une récolte anarchique menaçant la protection de ces ressources.  Les commerçants impliqués dans l’exploitation de PFNL ont une vision égoïste et à court terme car les forêts ne sont pas leur propriété ; ils les considèrent comme une source d’enrichissement et une ressource à exploiter sans état d’âme. La DGF est une administration dédiée à la gestion et la préservation du patrimoine forestier, or promouvoir une filière professionnelle des PFNL exige le respect d’une démarche entrepreuneuriale. Comment dès lors concilier les deux ?

Lorsqu’on évoque la filière, il est nécessaire de prendre en compte l’obligation de disposer des filières professionnelles adjacentes qui supposent la création d’une industrie agroalimentaire, pharmaceutique, cosmétique et autres industries de certification, marketing et de distillation. De ce fait, il y a nécessité d’alimenter une base de données sur les opérateurs agissant dans ces secteurs. L’économie forestière ce n’est pas seulement l’arbre. C’est le riverain qui est capable de protéger la forêt, sa durabilité est basée sur l’exploitation raisonnée des PFNL. Pour les agents forestiers, l’important c’est la préservation de l’écosystème ; mais si l’on veut assurer la protection de l’écologique, il faut aussi développer l’économique et le social dans le même temps. En vérité, les paysans et riverains sont faiblement enclins à l’entretien du caroubier par exemple. Les riverains déclarent que cet arbre leur a été légué par les ancêtres. « Ce sont nos pères qui les ont plantés, c’est un don de Dieu… Nous n’avons rien apporté. »

On observe par ailleurs que les acteurs institutionnels sont peu branchés sur les PFNL. La génération de revenus issus des PFNL dans le commerce illicite et informel passe inaperçue aux yeux des institutions. Le manque à gagner pour celles-ci est très élevé, en premier lieu pour la Direction générale des forêts qui est l’acteur institutionnel de la politique nationale des PFNL. Son intervention est relayée par les services de la Conservation des forêts de chaque wilaya du pays, 48 au total. Quant aux communes et collectivités territoriales, elles ont peu d’impact sur la gestion des forêts. Les ressources financières échappent donc à une planification opérationnelle des investissements consacrés aux projets forestiers. Les informations recueillies auprès des services forestiers sur les PFNL révèlent la faiblesse des études réalisées, la quantification, la régénération, les méthodes de récolte et l’impact de ces méthodes sur la survie des ressources, aboutissant à une méconnaissance du fonctionnement de ces filières.

Typologie des acteurs locaux

Les profils des acteurs de cette filière professionnelle rassemblent tout autant des riverains qui assurent, sporadiquement, l’entretien des plantations, des cueilleurs, saisonniers, recrutés lors de la saison de cueillette, jeunes chômeurs et adolescents, des collecteurs-regroupeurs qui assurent le stockage, rassemblent les récoltes dans un hangar pour un donneur d’ordre. En général ce donneur d’ordre est l’intermédiaire-mandataire qui assure la liaison entre regroupeurs et commerciaux sous l’égide d’une poignée d’opérateurs qui dominent le « marché ». Quelques rares distillateurs qui ont acquis de l’expérience font partie du lot. L’essentiel de leur production est exporté. Enfin, on trouve aussi de rares exportateurs qui font fait main basse sur la récolte disponible soit pour la traiter, soit pour la revendre en l’état à l’étranger.

La majorité des matières premières issues des PFNL est fournie aux unités de transformation par des intermédiaires privés composant des réseaux informels importants. Le transport et l’acheminement, souvent illégal, des produits se développent par une mainmise sur l’étape de commercialisation et par un détournement des réglementations. Les principaux réseaux de commercialisation se caractérisent par une grande opacité. On relève ainsi un informel contraignant et une administration dépassée par des dispositions réglementaires archaïques, appliquées de façon aléatoire et peu respectées. Ce laisser-aller et une absence d’encadrement aboutissent à une évaluation inconsistante des concessions d’adjudication et des « itinéraires » des récoltes. Cela conduit à une complicité, parfois intéressée ou par crainte de représailles, avec les acheteurs extérieurs et peu d’encouragement aux potentiels locaux et riverains des forêts.

Le droit d’accès constitue la cheville ouvrière du droit d’usage. La jouissance du droit d’usage peut être restreinte en fonction de l’espace forestier où il est exercé. C’est le cas lorsqu’une zone est mise en défens, ou lorsqu’elle devient une zone de conservation particulière. On ne peut interdire aux populations riveraines l’accès aux PFNL. La reconnaissance d’un droit d’usage particulier aux riverains a pour objectif une forme d’équité sociale. Ce droit doit permettre à ces riverains de valoriser leurs savoirs traditionnels à travers des activités de transformation de ces ressources forestières.

La difficulté réside dans l’intitulé « populations riveraines des forêts ». Il ne suffit pas de vivre à l’intérieur ou à proximité d’une forêt pour être habilité à y exercer le droit d’usage. Dans la pratique, le droit d’usage est reconnu au riverain traditionnel, c’est-à-dire celui qui a un lien particulier avec la terre où se trouve le produit. La gestion non intégrée de cet espace fragile, aussi bien par les populations, cultivateurs ou pasteurs ou les deux à la fois, que par les acteurs institutionnels, rend la concrétisation du développement difficile, accélérant la dégradation des ressources forestières.

Pour réussir la stratégie en termes de durabilité et sortir la filière de son caractère illégal et informel, le plus important est la création, à l’instar des eaux minérales, d’une obligation d’agrément de l’administration forestière pour toute personne désireuse de procéder à l’exploitation d’un PFNL. Est-ce que cela créera davantage de lien social dans les périmètres qui offrent des opportunités à cette exploitation ? Quelles conclusions tirer de cet exemple ?

Que faire pour une durabilité à cette exploitation

La valorisation durable des PFNL semblerait exiger, dans un premier temps, une coordination entre les départements ministériels intervenant dans le domaine. Si l’on revient à la base, la commune en tant qu’opérateur économique, peut s’attribuer un titre d’exploitation des produits forestiers non ligneux. Celle-ci peut devenir le cadre idoine incluant les jeunes comme agents de collecte et les petites entreprises capables de sous-traiter (avec un opérateur national, transformateur ou distillateur) l’une des activités de transformation ou de commercialisation. Il est donc impératif de bannir l’attitude dirigiste décidée « d’en haut » et impliquer les populations pour la mise en œuvre d’un « contrat-programme ». D’où la nécessité d’une approche partenariale.

Le plus apte à protéger la forêt demeure le riverain dès lors qu’il se sent impliqué, reconnu et trouvant un intérêt à le faire. L’administration des forêts est appelée à déléguer aux populations riveraines une partie de la gestion forestière. En effet, on fait porter deux casquettes au forestier : protéger en tant qu’agent de répression ; encadrer en devenant agent de développement. L’idéal serait qu’il existe une volonté politique de promouvoir et d’encadrer la filière avec une stratégie nationale de valorisation de ses produits. Un partenariat public/public entre administration des forêts et Direction de l’emploi (ANEM, ANSEJ), entre forestiers et services agricoles peut faciliter une gouvernance intégrée ; mais aussi un partenariat public/privé entre services publics et coopératives locales, et/ou un consortium de coopératives national pour jeter les fondements d’une gestion intégrée de la filière PFNL et du patrimoine forestier.

L’objectif global est de freiner le déclin des écosystèmes sensibles. Pour ce faire, les riverains seront appelés à identifier le potentiel forestier dont la mise en valeur, préservant sa régénération, se fera à partir de programmes consensuels de type coopératif. Car les massifs forestiers peuvent valoriser l’artisanat, développer l’écotourisme et les activités de transformation des produits. Les coopératives seront ainsi un moyen d’accès au progrès technique pour les agriculteurs et exploitations familiales ; et faciliteront cette promotion de l’artisanat et du tourisme vert. Car il s’agit d’éviter le risque écologique, le pillage de la ressource et la généralisation de la délinquance forestière.

Pour assurer la pérennité des reboisements, l’entretien des espaces forestiers et le captage de source, la construction de bassins est nécessaire. Cela aussi crée du lien social, même s’il peut s’avérer parfois conflictuel. De même, la mise en application d’un plan de cueillette des PFNL exige la présence des forestiers, ainsi que de créer du travail pour les riverains et valoriser aux yeux de la population autant la forêt que ses produits. Les terres de parcours en zone forestière doivent faire l’objet d’une évaluation, avec la collaboration du riverain éleveur, de ses besoins, de son troupeau, afin de l’associer à l’aménagement forestier et à son plan de gestion. Car, si le forestier intervient en matière de police forestière, de génie forestier, d’ouvertures de pistes, n’ayant pas pratiqué l’art du sylviculteur ni celui de l’aménagiste il manque de perfectionnement pour les travaux de reboisement, en matière de sylviculture et de conduite des peuplements.

On se retrouve ainsi dans une vision micro ou macroéconomique selon que l’on opte pour l’une des options. Sauf à vouloir les intégrer l’une dans l’autre et les rendre complémentaires, ce qui constituerait une troisième voie.

S’agit-il de mettre en œuvre une stratégie de création-développement de la filière, ou bien veut-on améliorer le sort des populations riveraines par la promotion de petites entreprises d’exploitation des PFNL, dans un environnement peu outillé pour le développement d’une filière ? Ce qui en réalité renvoie davantage au développement durable et donc à la création de lien social. La réalisation de nouvelles plantations est forcément à envisager avec le concours des populations riveraines.

En effet, les PFNL sont des produits dont la commercialisation va du marché de village où s’approvisionne le consommateur local jusqu’aux unités sophistiquées de transformation d’un secteur industriel en voie d’expansion, que ce soit dans les pays développés, attirés par le caractère bio de ces produits, ou les pays en développement motivés par le gain et la montée des prix observée depuis quelques années (Benbekhti, 2008). Un nouveau cadre opérationnel doit donc être activé. Tout exploitant d’un espace forestier en concession est tenu de préserver les ressources forestières non ligneuses. L’administration des forêts doit imposer, à travers un cahier des charges, à tout exploitant de procéder à une étude socioéconomique préalable permettant aux riverains d’identifier celles des ressources justiciables d’exploitation. Pour démarrer la croissance de la filière, la microentreprise est la solution la plus simple, soit sous la forme EURL ou SARL, soit à travers un réseau de coopératives. Le métier de négociant en PFNL doit aussi s’exercer et s’imposer. Cela exige un changement de paradigme et donc de nouvelles approches.

Conclusion

Le développement durable ne pourrait se réaliser sans l’implication des populations dans les choix et les programmes. Il s’agit en effet de concilier l’homme avec son milieu. Pour cela, il y a lieu de rompre avec les politiques « d’en haut » inadaptées à l’aménagement du territoire, à la lutte contre la précarité économique et sociale des éleveurs et pasteurs, qui n’intègrent pas ceux « d’en bas » (Benbekhti, 2019).

Le pouvoir c’est la faculté qu’accorde une société à des personnes pour la gouverner. Il n’est ni total, ni définitif, ni indépendant car il est censé être contrôlé. Qui contrôle le pouvoir ? Qui supervise son exercice ? L’antidote contre le poison d’un pouvoir central autoritaire peut s’incarner dans la régionalisation : les Länders et leur puissance en Allemagne, les Communautés autonomes en Espagne, etc. La région est d’abord un espace, ensuite une logique et enfin un pouvoir. Si la raison peut se dédouaner d’une telle polysémie, la région charrie d’autres signifiants, parfois péjoratifs, formés d’enjeux géopolitiques, économiques et culturels, rationnels et irrationnels. Le débat se nourrit d’une préoccupation non exclusive : comment se structure et s’organise l’espace local et régional, quel éclairage apporte le développement local dans la réussite économique des régions, comment s’organise le pouvoir des régions, et comment s’articule l’émergence des régions dans la mondialisation ?

La région est un espace résultat de contraintes naturelles sur lesquelles se combinent des activités humaines. Comment intégrer le local dans le national en valorisant le poids géographique, culturel, économique et social d’une région ?

Les contraintes géographiques et écologiques consacrent l’organisation de l’espace. On parle de « région pastorale », de « région agricole », de « région maritime » ou encore de « région industrielle ». Mais les espaces régionaux ne sont pas que le produit de structurations écologiques et le résultat d’activités économiques. Ils deviennent des « espaces vécus » dans lesquels les hommes investissent leurs représentations, des modes de vie, des traditions et des cultures. Des identités s’épanouissent autour de l’articulation entre espace construit et espace investi.

Il n’y a plus des « régions naturelles », mais des espaces organisés selon des logiques de centralisation, de contrôle, de valorisation ou dévalorisation, de renforcement ou de marginalisation, actionnées sous l’euphémisme des « politiques d’équilibre régional ». La région devient un sous-ensemble administratif, bénéficiant d’une répartition des ressources, sous forme de localisation/délocalisation, décentralisation/déconcentration et de délégation d’autorité. Cela ne va pas sans problème.

Quel que soit le régime, les pesanteurs de l’histoire et les formes de représentation des populations, la question du pouvoir de décision s’impose. Elle est liée aux prérogatives des citoyens face aux projets qu’ils acceptent ou non de partager. Une région voudra, en fonction de son potentiel, promouvoir son développement sans préjudice de son attachement à la nation. Cela peut susciter des oppositions avec un centre de décision, acceptant difficilement que « quelque chose lui échappe ». Ressurgit l’antagonisme entre citoyenneté et modèles de développement : faut-il, pour être citoyen, adhérer à une vision centrale, influencée peut-être par des considérations régionalistes et claniques, ou s’ériger en promoteur de son développement, libéré d’une tutelle éloignée des situations locales ? C’est ce questionnement qu’il faut prendre en charge si l’on ne veut pas déboucher sur de « fausses solutions » à cause de problèmes « faussement posés ». Un nouveau sens devrait être donné à l’exercice du pouvoir pour qu’il ne soit plus centralisé, omnipotent, ni solitaire. Cette question interpelle car elle est au fondement de la représentation : qui représente qui ? Et qui décide pour quoi, pour qui ?

Les notions de décentralisation ou de développement durable « par le bas » sont peu pratiquées dans les faits, les maires n’étant souvent que des exécuteurs au service d’un wali. On observe ainsi qu’une appréciation tendancieuse de la régionalisation ouvre la voie à un excès de centralisation. La régionalisation devient une pratique politique qui consiste à diviser le fonctionnement d’un État pour instaurer une décentralisation des pouvoirs afin d’assurer le développement économique et social de régions permettant l’amélioration de la gestion du territoire. Cela a donc pour but l’émergence des compétences locales et une accumulation à partir des capacités locales de création de richesses, un contrôle de leur répartition. La régionalisation ne pousse pas à la division, elle actualise la pratique de l’aménagement du territoire et la prise de décisions, une plus grande transparence dans les prises de décision et donc plus de démocratie.

L’observation du terrain a montré que l’émergence d’initiatives locales, pour créer les conditions d’un développement durable n’est pas évidente. Les initiatives locales ont du mal à se construire dans la durée. Le développement exige une planification stratégique pour programmer des objectifs contextualisés et liés aux spécificités territoriales. La décentralisation est donc la forme la mieux adaptée aux spécificités de la diversité territoriale. Dans ce contexte, les citoyens sont des acteurs dans le processus de développement économique et social et dans la chaîne de valeurs. L’absence de vision et d’aménagement du territoire local n’encourage pas les initiatives et les actions innovantes. Et de facto, la participation des acteurs locaux est faible lorsqu’il s’agit de programmes économiques centralisés.

Le paradoxe de ce développement durable est que sa maîtrise par les acteurs locaux reste conditionnée par une implication des pouvoirs centraux dans une dynamique de transfert des compétences au niveau local. En outre, une impulsion de l’économie devra inciter à des investissements autres que ceux préconisés par le système capitaliste libéral, à savoir investir dans une économie préservant les ressources et l’environnement. Face au désastre écologique et au chaos économique du capitalisme financier et du libéralisme sans condition, c’est à une nouvelle vision du développement qu’est appelé le développement humain. Ce qui demeure exclu par la nature du pouvoir financier actuel qui domine l’économie. Seules les banques font la loi.

Une éducation à l’écologie, à l’harmonie du développement local, dès l’enfance, reste ainsi le préalable à toute velléité d’acquisition d’un paradigme pour le développement durable. C’est aussi un facteur d’éclosion pour une gouvernance démocratique.

Sigles utilisés

– APC : Assemblée populaire communale

– APW : Assemblée populaire de wilaya

– ANEM : Agence nationale de l’emploi et de la main-d’œuvre

– ANSEJ : Agence nationale de soutien à l’emploi des jeunes

– CAPCS : Coopérative agricole polyvalente des céréales et services

– DGF : Direction générale des forêts

– DSA : Direction des Services Agricoles

– EURL : Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée

– FAO : Food and Agriculture Organization

– FMI : Fonds monétaire international

– PFNL : Produits forestiers non ligneux

– SARL : Société anonyme à responsabilité limitée

Bibliographie

Benbekhti Omar (2004). La stratégie sociale du développement rural. Introduction aux méthodes de l’approche participative. Oran (Algérie), Dar El Gharb.

Benbekhti Omar (2008). « Le développement rural en Algérie face à la mondialisation des flux agricoles ». In : L’Algérie face à la mondialisation (dir. : Chentouf T.). Dakar (Sénégal), éd. Codesria, pp. 86-97.

Benbekhti Omar (2019). Rapport de synthèse. Projet TCP/ALG/3701. Alger, DGF/FAO.

DGF/FAO (2021). Stratégie de promotion des produits forestiers non ligneux en Algérie. Assistance technique pour le développement des microentreprises forestières basées sur certains produits forestiers non ligneux en Algérie : cas du romarin Rosmarinus officinalis, du caroubier Ceratonia siliqua et du pin pignon Pinus pinea. Projet TCP/ALG/3701. Alger, Représentation de la FAO en Algérie.

FAO (1999). « La FAO et la foresterie : vers une définition harmonisée des produits forestiers non ligneux ». Rome, FAO. URL : https://www.fao.org/3/x2450f/x2450f0d.htm

ONU (1987). Notre avenir à tous. Rapport de la commission mondiale sur l’environnement et le développement, présidée par Gro Harlem Brundtland [disponible en ligne sur Wikisource].

Sahli Zoubir (2021). « La gestion urbaine et le développement local en Algérie », article publié en ligne sur Linkedin et Facebook, 2 octobre 2021.


[1] Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation, en anglais (United Nations for) Food and Agriculture Organization. Tous les sigles utilisés dans l’article sont récapitulés à la fin du texte.

[2] Le Rapport Brundtland est le nom donné à une publication, intitulée Notre avenir à tous (Our Common Future), rédigée en 1987 par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’Organisation des Nations unies, présidée par la Norvégienne Gro Harlem Brundtland. Utilisé comme base au Sommet de la Terre de 1992, ce rapport utilise pour la première fois l’expression « sustainable development », traduit en français par « développement durable », et il lui donne une définition : « Le développement durable est un mode de développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. » (ONU, 1987).

[3] Zoubir Sahli est expert agroéconomiste de l’Institut National d’Agronomie (Alger). Il a publié une série d’articles et entretiens dans le journal El Watan, sur Facebook et Linkedin en septembre et octobre 2021, sur les questions de développement local, de sécurité alimentaire et d’environnement.

[4] La wilaya est la circonscription administrative de base, équivalente des provinces, départements, préfectures, selon les dénominations propres à chaque pays. La wilaya est dirigée par un wali nommé par le pouvoir central. Les Assemblées populaires de wilaya (APW) et les Assemblées populaires communales (APC) sont les organes délibératifs respectivement des wilaya et des communes.


Auteur / Author

Omar Benbekhti est docteur en sociologie du développement de l’Université Paris-X Nanterre. Professeur à l’Université d’Oran 2 (Faculté des sciences sociales), il a assuré depuis 1996 plusieurs missions d’expertise dans le secteur du développement rural pour le compte de nombreux organismes locaux et internationaux. Ses réflexions touchent de façon générale les projets de réalisation dans le domaine rural et local.

Omar Benbekhti holds a doctorate in sociology of development from the University Paris-X Nanterre. He is a professor at the University of Oran 2 (Faculty of Social Sciences) and since 1996 he has carried out several expert missions in the rural development sector on behalf of numerous local and international organisations. His reflections concern in a general way the projects of realization in the rural and local field.


Résumé

Le paradoxe du développement durable est que sa maîtrise par les acteurs locaux reste conditionnée par une implication des pouvoirs centraux dans une dynamique de transfert des compétences au niveau local. L’observation du terrain a montré que l’émergence d’initiatives locales, pour créer les conditions d’un développement durable n’est pas évidente.

Mots clés

Développement durable – Gouvernance – Démocratie – Participation – Acteurs locaux – Lien social.

Abstract

The paradox of sustainable development is that its control by local actors remains conditioned by the involvement of central powers in a dynamic of transfer of skills at the local level. Observation of the field has shown that the emergence of local initiatives to create the conditions for sustainable development is not obvious.

Key words

Sustainable development – Governance – Democracy – Participation – Local actors – Social link.